Quand, "est-ce que je sais", devient le Monte Somega« Il fut un temps où l'Italie avait faim de cartes. Juste après l'unité du pays, et avant le XXème siècle : ça c’était l’Italie; Les politiciens pédalaient. Luigi Vittorio Bertarelli, président du Touring Club italien et fils de la grande bourgeoisie milanaise aujourd'hui éteinte, transpirait tout seul sur son vélo , le long des routes du Sud profond - mont Polinno, plateau de la Sella et Aspromonte - armé d’un cahier . En y notant les pentes les passages à niveau , l'état de la chaussée et en inventant pour lui-même les prototypes de ce qui allait devenir l'actuelle signalétique de la planète Italie .
… Pour connaître les toponymes de moindre importance, on interrogeait les paysans et parfois la réponse faisait autorité, même s’il s'agissait d’un « misai nen » (j’en sais rien ), ou bien d’un « so mega » (est-ce que je sais ), qui devint pendant quelques temps le Monte Somega.
… Ce fut dans ce contexte que prît forme l'idée de Bertarelli. Pour créer les cartes, il fallait mobiliser les membres du Touring Club. La réponse de l'Italie unifiée fut stupéfiante. On vit s'abattre des avalanches de détails.
C'étaient des cartes extraordinaires. La dernière merveille de cette époque révolue fut le grand Atlas International de 1950, qui projeta le Touring Club tout en haut de la géographie mondiale et devint le nec plus ultra du genre .
Ces propos qui pourraient être considérés comme chauvins, sont confirmés par le Bulletin des Bibliothèques de France. (ndlr)https://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-1959-12-0547-002"De nos jours, l'atlas du Touring club italien reste indiscutablement l'un des meilleurs; mais il est, par la qualité, en compétition avec l'atlas anglais du Times et l'atlas soviétique Atlas Mira. Ce dernier, dont la valeur technique est incontestable, est malheureusement édité en caractères cyrilliques et, de ce fait, perd chez nous ses qualités essentielles d'atlas de référence."
… De nos jours tout cela est fini , le pays s'est perdu lui-même, il assiste sans broncher à l’éclipse du territoire. Les cartes disparaissent , alors qu’en France et en Allemagne, elles sont vendues dans les maisons de la presse, étudiées à l’école et à l’université.